Une plus grande précarité

En ce mois de mars, marqué par la Journée internationale de lutte pour les droits des femmes (8 mars), il nous paraissait essentiel de souligner l’importance de la question du genre lorsque l’on parle de droit au logement et de mal-logement. En effet, les femmes sont encore aujourd’hui davantage précarisées que les hommes*, ce qui a un impact direct sur leur accès au logement.

Cette plus grande précarité s’explique en partie en raison de l’écart salarial annuel (21%**) entre femmes et hommes et de la charge du ménage et des enfants, qui entrave la disponibilité des femmes sur le marché du travail. Les femmes représentent également 83 % des chef·fes de familles monoparentales*** et touchent une pension moindre que les hommes.

Le logement : un vrai parcours de combattante

Avec un ou plusieurs enfants à charge, les femmes seules finissent souvent par accepter des logements trop chers et de mauvaise qualité, soucieuses d’offrir une certaine stabilité à leurs enfants****. Elles subissent également une discrimination accrue de la part des agences immobilières et des propriétaires et sont parfois confrontées à des situations de harcèlement de la part des bailleurs lorsqu’elles accèdent au logement souhaité. Les stéréotypes misogynes liés à la supposée incapacité des femmes à gérer un budget, à entretenir un logement ou un espace extérieur ont en effet encore la vie dure*****. La précarité des femmes accentue encore également l’inégalité de traitement de la part des bailleurs ainsi que le sentiment de vulnérabilité dans le rapport de force que constitue le rapport entre locataires et propriétaires.

Notons également que les femmes sont majoritaires dans les logements sociaux et qu’elles sont les premières à subir les conséquences du statut de cohabitant légal, une mesure d’un autre âge contre laquelle nous vous invitons à vous mobiliser via la plateforme Stop Statut Cohabitant.

Violences conjugales et intrafamiliales

Enfin, les trop nombreuses femmes qui fuient une situation de violence conjugale ou intrafamiliale se retrouvent confrontées à l’urgence de retrouver un logement, assez grand pour accueillir leurs enfants si elles en ont, sous peine de se retrouver à la rue. En effet, le fait de fuir des violences psychologiques, sexuelles et physiques est une des premières causes du sans-abrisme féminin******.

Ce sont en particulier ces femmes et ces enfants auxquel·les viennent en aide les travailleuses de l’association Aprèstoe, une asbl qui offre à ces familles un service de guidance à domicile. Le 8 mars dernier, nous sommes allé·es à la rencontre de sa directrice, Sarah Vanempten, qui nous a exposé les missions principales de l’asbl.

Focus sur Aprestoe, au plus proche des femmes

L’asbl Aprèstoe est née en 2014 du constat que certaines femmes, après un séjour en maison d’accueil, ont encore très souvent besoin de soutien au quotidien, tant au niveau administratif et financier que social. C’est ainsi que deux maisons d’accueil, Porte Ouverte et Talita, ont fondé cette nouvelle asbl axée sur la guidance à domicile, qui accompagne actuellement entre 60 et 80 familles.

« Le logement, c’est la base, le début d’une nouvelle vie ». Sarah Vanempten, Directrice de l’asbl Aprestoe

Une partie des femmes suivies par l’asbl emménagent à leur sortie de la maison d’accueil dans un logement issu du marché privé mais qui s’avère souvent en mauvais état ou trop petit. Les travailleuses d’Aprestoe commencent alors dès le début de l’accompagnement les inscriptions sur les listes des Agences Immobilières Sociales (AIS) et du logement social.

Depuis deux ans, Aprèstoe travaille par ailleurs directement avec l’Agence Occupations Temporaires de la FéBUL pour permettre à certaines femmes et leurs enfants d’occuper temporairement des appartements remis aux normes de salubrité par notre équipe technique et mis temporairement à disposition par les propriétaires des bâtiments. Nous avons actuellement deux projets en cours avec Aprèstoe, l’un dans les Marolles, où 9 appartements de deux chambres sont occupés par des bénéficiaires de l’asbl, et l’un au cœur du quartier Helmet où Aprèstoe dispose de 6 appartements de 2 ou 3 chambres. Au-delà d’un suivi individuel au quotidien, l’asbl mène un travail intensif pour trouver une solution de logement durable pour ces femmes.

Pour Sarah Vanempten, le constat est clair, pour ces femmes qui ont été victimes de violences conjugales et intrafamilales : « le logement, c’est la base, le début d’une nouvelle vie ».

* En Belgique, selon les chiffres de Statbel pour 2019, 70% des personnes en situation de pauvreté individuelle sont des femmes

** Rapport de 2017 sur l’écart salarial entre les femmes et les hommes en Belgique par l’Institut pour l’égalité des femmes et des hommes

*** Guide pratique de l’Asbl Angela D., Une approche féministe du logement

**** Nicolas Bernard, Femmes, précarité et mal-logement : un lien fatal à dénouer (2007)

***** Idem

****** Guide pratique de l’Asbl Angela D., Une approche féministe du logement